Parinoush Saniee – Le voile de Téhéran ****

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Éditeur : Points – Date de parution : mai 2016 – 610 pages

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Nous sommes en Iran, dans les années 60. Grâce à la modernisation opérée par le Shah, les filles ont accès aux études. Massoumeh, seize ans, est très douée au collège et désire poursuivre ses études. Avant de partir s’installer à Téhéran, ses frères font pression pour qu’elle se marie, car ils ont peur qu’elle se fasse pervertir par la vie citadine… Seul son père semble la comprendre ; grâce à son indéfectible soutien, Massoumeh intègre la classe de 4ème au collège de Téhéran. Elle y rencontre une adolescente un peu folle et extravertie, Parvaneh, qui devient sa meilleure amie. Un soir en rentrant des cours, elles passent par la pharmacie et découvrent le nouvel assistant du pharmacien, Saiid Zareii. Massoumeh tombe tout de suite follement amoureuse de lui ; et c’est réciproque. Il la guette matin et soir au seuil de la pharmacie… Mais quand ses frères découvrent cette histoire d’amour naissante, la foudre s’abat sur la maisonnée, et un mariage forcé est organisé dans la précipitation avec un homme qu’elle n’a jamais vu…

D’abord désespérée, en colère et le cœur brisé, Massoumeh décide finalement d’affronter son destin. M’attachant immédiatement à l’héroïne, j’ai éprouvé un immense sentiment révolte pour ce qui lui arrivait ; je me suis identifiée à cette jeune femme brisée qui devient épouse malgré elle et va traverser de nombreuses épreuves. Sur une quarantaine d’années, nous suivons son évolution et celle de son pays : le régime du Shah, les attentats communistes qui se trament dans l’ombre, le changement des mœurs, la révolution qui se préparent et s’abat sur le pays, les oppositions entre islamistes et communistes, la guerre contre l’Irak…

C’est un roman autobiographique qui met en relief les conflits sociaux et politiques… On apprend beaucoup de choses sur l’histoire de ce pays tiraillé entre tradition et modernité. Ce roman nous offre également le témoignage magnifique d’une femme au parcours semé d’embûches, dans un pays où les femmes n’ont quasiment aucun droit et où elles dépendent des hommes, dans une absence d’égalité flagrante.

J’ai éprouvé une telle empathie pour cette femme que j’ai souvent été émue aux larmes. J’ai tellement aimé ce roman que j’ai eu bien du mal à écrire cette chronique…  Cette histoire m’a bouleversée et les dernières pages laissent un goût amer. Un livre puissant, dont j’ai dévoré les mots et que j’ai terminé à regrets.

Un immense merci aux éditions Points pour cette découverte et ce grand coup de cœur…!

éditions POints

 

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« Il y avait eu tant de vie autrefois dans cette maison désormais silencieuse. J’ai séché mes larmes et, le cœur lourd, j’ai verrouillé les portes, prenant congé de ce chapitre de ma vie, de mon bonheur et de ma jeunesse. Et je suis partie. »

« Je me demande souvent ce que cette vie m’a apporté. Ai-je jamais eu une destinée à moi ? Ou n’ai-je été qu’un élément dérisoire du destin des hommes de ma vie, d’hommes qui m’ont tous, d’une manière ou d’une autre, sacrifiée sur l’autel de leurs convictions et de leurs objectifs ? »

Firouz Nadji-Ghazvini – Les anges ne reviendront pas ***

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Éditeur : Denoël – Date de parution : 2005 – 117 pages

4ème de couverture : « Téhéran, quelques mois avant la révolution islamique. Un climat de terreur sourde règne sur la ville. Entre les soubresauts de la Savak, la police politique du shah, et les premières exactions des mollahs, chaque jour apporte son lot d’attentats inexpliqués. Quatre étudiants amoureux de Tchekhov expriment leur angoisse et leur nostalgie par la voix de Kamran, le narrateur, hypersensible aux transformations souterraines du Téhéran doré de sa jeunesse… »

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Téhéran, au début de la révolution islamique. Kamran, Niloufar, Mithra et Nader sont quatre étudiants épris de théâtre et de littérature, spectateurs impuissants face à la tragédie qui a lieu sous leurs yeux. Un récit sombre porté par une écriture  lumineuse et poétique. Réalité et rêveries du narrateur s’entrecroisent avec mélancolie.

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« – Pourquoi êtes-vous tous si convaincus de ce goût universel des hommes pour la barbarie ? »

« Il dit que c’est avec l’idée de la vérité que le monde prend vie, que c’est en supprimant tout ce qui la contredit qu’on existe. On parle de crime. Mais c’est avec le crime que le monde naît. Tenter de l’empêcher est vain. »

« Je suis venu sur la plage pour regarder s’échouer les vagues et récupérer le poisson échappé de mes rêves. Je suis là pour écrire une lettre, la déchirer et la confier aux flots. Il paraît que la nature ne se répète jamais. Pourtant, en cet instant, il me semble que tout se répète uniformément. Comme les oiseaux, j’ai envie de crier ma peur du couchant. J’attends l’obscurité et le bleu paisible de la nuit. Je regarde les mouettes tournoyer encore et encore par-dessus les vagues. Je me dis qu’il faut goûter les plaisirs les plus infimes puisqu’il n’y en aura pas d’autres. »