Laurine Roux – Le Sanctuaire ***

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Les éditions du Sonneur – août 2020 – 160 pages

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Le Sanctuaire, c’est cette zone montagneuse et isolée du reste du monde où s’est réfugiée la petite famille de Gemma pour échapper à un mystérieux virus qui aurait été transmis par les oiseaux et qui aurait exterminé une bonne partie de l’humanité.

Gemma, la plus jeune des deux sœurs, est une enfant devenue chasseuse de génie, qui ne sort jamais sans son arc. Si elle connaît le moindre recoin du Sanctuaire, du monde avant la pandémie elle ne connaît en revanche que les récits de ses parents et de sa sœur June.

Leur mère est souvent plongée dans ses souvenirs du monde d’avant la pandémie, ses livres et ses récits mythologiques. Leur père est un être tyrannique qui dispense une éducation à la dure, pour permettre à ses filles de survivre dans ce monde où l’ennemi prend n’importe quelle forme, et surtout celle des oiseaux…

Un jour que Gemma s’aventure seule un peu plus loin dans la forêt, elle tombe sur un vieil homme sauvage et virulent qui vit entouré de crasse et de rapaces. Parmi eux, un aigle avec lequel l’enfant va nouer des liens spéciaux ; à son contact, elle se sent étrangement vivante. Cette vérité nouvelle percute de plein fouet celle de son père qui lui a toujours appris à maudire et abattre les oiseaux. Peu à peu, le désir de transgression la taraude et le désir de goûter à la liberté s’empare d’elle.

Dès les premières lignes, l’écriture de Laurine Roux m’a embarquée au coeur de ce monde post-apocalyptique ; le charme des mots a opéré. Le Sanctuaire est un très joli roman, sauvage et poétiquenature et poésie sont omniprésentes. 

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Emily St. John Mandel – Station Eleven ****

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Éditeur : Rivages – Date de parution : août 2016 – 480 pages

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J’ai lu ce roman dans le cadre d’une lecture commune avec Fanny, du blog Pages versicolores, et ce fut un plaisir d’échanger et de partager cette lecture avec elle ! Pour retrouver son propre billet et découvrir son avis, c’est par ici !

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Un soir d’hiver à l’Elgin Theatre de Toronto, le célèbre acteur Arthur Leander s’écroule sur scène. Son cœur cesse de battre en pleine représentation du Roi Lear. Un des spectateurs, Jeevan, se précipite sur scène pour tenter de secourir l’acteur, mais il est trop tard. Dans l’ombre de la scène, une petite fille sanglote. En sortant du théâtre, Jeevan n’a pas le cœur à rentrer chez lui. Il erre dans les rues, sous les flocons de neige, lorsque l’appel d’un ami urgentiste lui apprend qu’une terrible pandémie de grippe, en provenance de Géorgie, se répand sur la ville de façon alarmante. Il le supplie de quitter immédiatement Toronto avec sa femme et son frère.

Vingt ans après le cataclysme, nous suivons La Symphonie Itinérante, une troupe d’acteurs et de musiciens qui déambule et voyage à travers la région du lac Michigan, dans des voitures transformées en caravanes. Envers et contre tout, ils jouent du Shakespeare et des morceaux de musique classique. Parmi cette troupe itinérante, cette seconde famille, se trouve Kirsten, l’enfant qui a assisté à la mort d’Arthur Leander. Elle a désormais vingt-huit ans et ne garde aucun souvenir de la première année qui a suivi la fin du monde. Construit sur ces échos d’un monde à l’autre, le roman alterne ainsi deux temporalités : ce qui s’est passé avant le cataclysme, et les années qui ont suivi dans ce monde post-apocalyptique.

Station Eleven est un roman difficile à classer et dont j’ai beaucoup de mal à parler tant il m’a remuée. C’est à la fois un roman de science-fiction, un roman d’aventures, nous faisant réfléchir sur l’homme et son devenir, l’art… Si au cours de ma lecture, j’ai pensé à Walking dead, la comparaison ne tient pas longtemps la route ; l’univers que nous dépeint Emily St John Mandel est particulièrement bien campé, et très réaliste : aucun détail n’est laissé au hasard.

L’intrigue dans laquelle on s’immerge complètement est tissée de multiples connexions entre l’avant et l’après cataclysme, elle met en scène des chassés-croisés entre les personnages, grâce à une plume sensible et incisive. Ce roman m’a littéralement enthousiasmée, émue, me transportant dans un Ailleurs qui nous questionne sur la fin possible d’un monde, le rôle de l’art et l’importance des souvenirs dans une vie, leur profonde subjectivité.

Un roman que je ne voulais pas refermer, que j’aimerais relire. ❤

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« L’enfer, c’est l’absence de ceux qu’on voudrait tant avoir auprès de soi. »

« Mes souvenirs d’avant le cataclysme ressemblent aujourd’hui à des rêves. Je me souviens d’avoir regardé par le hublot d’un avion, ce devait être dans le courant de la dernière année, et d’avoir vu du ciel la ville de New York. »

« Il est surprenant de voir la rapidité avec laquelle on en vient à trouver normal de vivre sur un banc, avec une simple valise, près d’une porte d’embarquement. »