Adrienne Brodeur – Festin sauvage ***

Le Livre de Poche – 2021 – 360 pages

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Rennie n’a que quatorze ans lorsque sa mère décide de la prendre pour confidente de son amour illicite pour Ben Souther. C’est l’été au Cape Cod, la chaleur est écrasante. « Rennie, réveille-toi… Ben Souther vient de m’embrasser. » Sa vie ne sera plus jamais la même. Elle grandit avec ce mensonge qui la lie à sa mère. Elle cesse d’être la fille de Malabar pour devenir sa conspiratrice et sa plus intime confidente. Sa meilleure amie… Elle devient complice de la trahison de sa mère et ne prendra conscience de l’ampleur des répercussions sur sa vie que bien plus tard.

Festin sauvage est un roman implacable et profondément intelligent. Un texte émouvant et viscéral sur une relation mère-fille hors norme. À travers ce roman qui s’inspire de sa vie, Adrienne Brodeur brosse le portrait d’une adolescente qui devient femme, qui se construit en tant que femme à partir de cette relation si spéciale avec sa mère – une mère qui prend toute la place, une mère dévorante.

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Joseph Boyden – Dans le grand cercle du monde ***

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Le Livre de Poche – 2015 – 687 pages

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Joseph Boyden nous offre une immersion spectaculaire dans les grands espaces sauvages du Canada au XVIIème siècle. A cette époque, les Français commencent à s’installer dans la vallée du Saint-Laurent alors que  les Iroquois et les Hurons se livrent une guerre sans fin. L’arrivée des Blancs ne va faire qu’exacerber les tensions entre eux.

Au fil des pages, trois voix se font entendre : celle du Corbeau, un jeune jésuite français, envoyé par l’Église pour convertir ceux qu’il appelle les Sauvages. On le surnomme Corbeau à cause de son ample robe noire dont les Indiens se moquent. Celle d’Oiseau, un chef de guerre huron qui désire ardemment venger la mort de sa famille, assassinée par les Iroquois. Et celle de Chutes-de-Neige, une captive iroquoise dont les parents ont été assassinés sous ses yeux par les Hurons et qu’Oiseau a décidé d’adopter, comme compensation pour la mort des siens.

Ces trois êtres sont réunis par les circonstances, mais divisés par leur appartenance. Chacun mène une guerre ; le Corbeau souhaite à tout prix convertir les Indiens – il consigne ses observations dans son journal afin de faire connaître ce Nouveau Monde aux Européens ; Oiseau ne vit que pour venger sa famille assassinée et se méfie de ces Corbeaux qui débarquent sur leurs terres, les soupçonnant d’apporter les maladies qui déciment leurs peuples. Quant à la jeune Iroquoise, elle est au début comme un animal sauvage, hargneuse et hostile…  Elle finira cependant par se laisser apprivoiser et accepter sa nouvelle famille.

Le Grand cercle du monde est un sacré pavé pour lequel j’ai pris mon temps. Je me suis plongée dans cette fresque foisonnante et fascinante sur l’histoire des Indiens… Mais aussi tragique. En effet, c’est l’histoire du début de leur fin ; la fin d’une civilisation, la fin d’un monde.

Les voix se succèdent au fil des courts chapitres, à un rythme soutenu. L’écriture de Joseph Boyden, poétique et évocatrice, nous transporte, entre émotion et frissons – je demeure captivée par les descriptions de certaines scènes de combat et de cérémonies de tortures terrifiantes. Immersion garantie dans l’immensité sauvage du Canada au XVIIème siècle ; on suit l’évolution des relations entre Christophe Corbeau, Chutes-de-Neige et Oiseau sur plusieurs années, l’évolution de leur psychologie, de leur regard sur ce monde pétri de traditions et de valeurs anciennes qui est en phase d’être métamorphosé par l’arrivée massive des Français.

Le Grand cercle du monde est un roman chorale d’une beauté féroce, à découvrir absolument.

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« Oiseau émerge du champ, comme enfanté par le maïs. Il a le visage peint, la tête rasée d’un côté, les cheveux longs de l’autre, qui brillent dans l’éclat de la lumière. Il s’avance, le pas lent et assuré, vêtu de son seul pagne. Il est plus brun que jamais après son voyage estival sous un soleil ardent et, à la suite des semaines passées à pagayer et à porter les canots, il a acquis le physique d’un dieu romain. J’ai du mal à décrire cet être dans les lettres que j’envoie en France. Il est à la fois homme et animal sauvage. »

Joseph Kessel – Les amants du Tage ***

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Le Livre de Poche – 1971 – 159 pages

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Antoine est un homme peu avenant, misogyne sur les bords, peu sociable. Il faut dire qu’il a du mal à se remettre de la trahison d’Ann, son ex femme. De retour de la guerre en 1945, il la découvre avec un autre homme. Sans lui laisser le temps de réfléchir, sa main s’empare de son arme et l’abat sur le champ.

La justice l’épargne, il échappe à la prison. Il s’exile, voyage et travaille à droite à gauche ; il se retrouve à Lisbonne. Il se lie d’amitié avec un gamin de douze ans, José le Yankee et loge chez sa mère Maria, une femme tout en chair et bourrelets, tout en bonté aussi – quand elle rit, son corps fait des vagues. Un jour, il prend en taxi une femme mystérieuse aux yeux verts, Kathleen. Une jeune femme qui cherche à fuir ses démons et son troublant passé en débarquant à Lisbonne.

On va dire que c’est le premier roman que je lis de Kessel – j’ai dû lire Le Lion dans mon enfance, mais je n’en garde strictement aucun souvenir… Les amants du Tage m’attendait dans une boîte à livres et sa couverture vintage m’a tout de suite attirée.

Les amants du Tage, ce sont deux personnages torturés et hantés par leur passé qui vont vivre un amour qui s’annonce tragique dès les premières heures. C’est en écoutant du fado ensemble qu’ils tombent amoureux, sans tout de suite se l’avouer. La plainte du fado les révèlent l’un à l’autre, et met en lumière la solitude – et la détresse – qui couve en eux, et à laquelle ils tiennent tant.

J’ai plutôt tendance à fuir les histoires d’amour en littérature. Et pourtant, j’ai été saisie dès les premiers mots par l’écriture de Kessel, fluide et cinématographique. Ajoutez-y un soupçon de thriller psychologique. J’ai lu ce roman en une soirée, la gorge nouée par l’émotion.

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« Ici est la fin de l’Europe, dit Kathleen à mi-voix, le carrefour des océans. Ce balcon est celui du vieux monde. »

« Alors, elle sentit que sa seule chance de vivre était cet homme et que la chaleur, la force, la simplicité primitives de cet homme étaient pour elle les seules défenses, les seuls remparts contre la nuit, la brume, la solitude et les fantômes. »

Nicolas Delesalle – Un parfum d’herbe coupée ***

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Éditeur : Le Livre de Poche – Date de parution : juin 2016 – 251 pages

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A l’enterrement de sa grand-mère, Kolia n’a même pas trente ans. Son grand-père, atteint d’Alzheimer, lui offrira ces derniers mots, lourds de vérité : « Tout passe, tout casse, tout lasse ». Quelques années plus tard, en repensant à ce moment-là, Kolia se projette dans le temps et s’adresse à son arrière-petite-fille, Anna, qui n’est pas encore née. Et il tente de mettre des mots sur sa vie jusqu’ici, les souvenirs de son enfance et de son adolescence resurgissent. A travers cette remémoration, il se demande ce qu’il restera de lui plus tard. Cette phrase de son grand-père, terrifiante de vérité, est le point de départ, le prétexte à son grand remue-ménage de souvenirs. Utilisant la métaphore de la photographie, Kolia part à la recherche de ces instantanés qu’il garde en mémoire… « Mais je veux quand même essayer de mitrailler le flou de ces petits moments qui ont changé mes joues, ces fragments d’enfance ordinaire… » Le narrateur interroge ces petits détails qui font tout.

Ce court roman est une très jolie découverte ; Nicolas Delesalle possède une plume intelligente et drôle. Anecdotes et souvenirs sont évoqués, à travers une atmosphère profondément nostalgique. Certains passages sont si bien décrits qu’ils sont drôles – comme celui sur sa découverte de la lecture, de Boris Vian – et d’autres très émouvants. Certaines phrases sont pleine de génie, elles font mouche et nous atteignent en plein cœur.

C’est un roman sur le souvenir, le temps et l’instant ; avec ses mots, le narrateur tente de capturer les images de son passé. Un petit livre criant de vérité, qui se déguste mot après mot, c’est presque un coup de cœur. Je me suis sentie étonnamment proche de Kolia, qui est un personnage touchant dans la mise à nu de son enfance.

Un grand merci au Livre de Poche pour cette belle lecture, que je n’oublierai pas de sitôt…

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« La vie est courte comme un flash, mieux vaut penser à sourire pour la photo. »

« Dès lors, ma libraire aux cheveux court devint mon dealer officiel. Chaque semaine, je revenais chercher ma dose et elle comblait méthodiquement les failles profondes creusées par une préadolescence de sportif joyeux mais illettré. »

« Et je suis entrée de plain-pied dans le temps, un peu comme on plonge enfin dans l’eau fraîche de l’océan après avoir mouillé ses pieds, en hésitant pendant des plombes dans les vaguelettes de la prime enfance. J’ai compris que j’étais bien. J’ai compris que j’étais content d’être bien. J’ai compris que c’était fragile, éphémère, un instant, jamais une vie, un hasard, jamais un dessein. »

« Ça fait toujours un drôle de bruit intérieur quand on laisse un endroit qu’on a longtemps hanté, on s’attache, ça craque, ça cogne, ça déchire, ça arrache. »

« C’était l’enfance qui se défendait. »

Oscar Wilde – Le Portrait de Dorian Gray ****

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Éditeur : Le Livre de Poche – Date de parution : 2001 [1890] – 277 pages

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Dorian Gray est un jeune homme qui possède une beauté hors du commun. Le peintre Basil Hallward en est littéralement tombé sous le charme. Depuis qu’il l’a rencontré, il semble lui vouer un véritable culte. Un jour qu’il est en train de le peindre, son ami Lord Henry débarque et fait la connaissance de Dorian Gray. Il éveille son intérêt en lui parlant de la jeunesse et de la beauté qui s’enfuient trop vite. Les paroles à l’influence machiavélique de Lord Henry remuent quelque chose aux tréfonds de son âme. Ces paroles éveillent en lui une insatiable curiosité de la vie, elles l’ont ensorcelé, ouvrant la boîte de Pandore de son âme. Après cette rencontre, Dorian Gray ne sera plus jamais le même…

Le tableau que peint Hallward lors de cette rencontre va également avoir un impact sur le jeune homme, tout juste sorti de l’adolescence. En voyant son tableau, Dorian Gray aura ces paroles, si célèbres et frappantes, ce vœux fou et démesuré : « Comme c’est triste ! Je deviendrai vieux, horrible, hideux. Mais le portrait restera toujours jeune. Il ne sera jamais plus vieux qu’il ne l’est en ce jour de juin… Si seulement c’était le contraire ! Si c’était moi qui restais toujours jeune et que ce fût le portrait qui vieillît ! Pour cela… Pour cela je donnerais n’importe quoi. Oui, il n’y a rien au monde que je ne donnerais : Je donnerais mon âme pour cela ! »

Le tableau provoque en lui une révélation éblouissante ; il se reconnaît et tombe littéralement amoureux de son image, de la jeunesse flamboyante que lui renvoie le tableau. Encore sous l’effet des paroles de Lord Henry, il devient comme fou devant ce tableau. Il dira d’ailleurs qu’il est une part de lui-même.

Une nuit, après avoir fait preuve d’une cruauté sans précédent avec sa fiancée, Dorian Gray constate avec effroi que le tableau a changé. Des rides de cruautés sont apparues sur le visage, son expression a indubitablement changé. En fait, son moi peint s’enlaidit à chaque péché. Le tableau est comme un miroir qui lui renvoie sa propre cruauté au visage… Qui lui fait prendre conscience de ses actes. Les signes du péché y côtoient les signes de l’âge. Le tableau est le reflet de son âme. Son vœux a été diaboliquement exaucé. Pour que personne ne puisse découvrir la vérité, il cache la tableau dans une pièce fermée à clé.

Ce livre est génial, au sens littéral : il y a du génie dans l’écriture d’Oscar Wilde et je me suis délectée de ses aphorismes que j’ai retrouvés page après page. C’est un roman impressionnant, dans lequel l’auteur explore les sentiments humains avec ironie et justesse, sur un ton parfois délicieusement impertinent.

Le personnage de Dorian Gray a beau être détestable, il n’en demeure pas moins fascinant. On ressent de l’aversion pour cet homme. C’est un être faible, impulsif et sa transformation tout au long du roman est stupéfiante. Les années passent et il s’adonne au plaisirs des sens, aux passions, gardant en tête les paroles de Lord Henry : « Guérir l’âme au moyen des sens, les sens au moyen de l’âme ». Il a soif de découvertes, il veut tout savoir, tout tester, tout apprendre. Mais il se lasse bien vite de tout. Cette multiplication des passions et des possessions, cette vie opulente le jour, s’accompagne d’une part obscure la nuit, lorsqu’il descend sur les quais…

Le Portrait de Dorian Gray est un livre incroyable, à la fois fascinant et horrifiant. Par moment, j’ai vraiment été saisie d’effroi et j’avais du mal à quitter ma lecture tellement j’étais emportée par l’écriture. C’est un classique incontournable, et un coup de cœur pour moi ! ❤

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« Les mots ! Rien que des mots ! Mais qu’ils étaient donc redoutables ! Qu’ils étaient clairs, vifs et cruels ! On ne pouvait leur échapper. Et pourtant ils contenaient une magie subtile. »

« Le vrai mystère du monde, c’est le visible et non l’invisible… »

« La vie réelle n’est que chaos, mais il y a, dans l’imagination, quelque chose de terriblement logique. C’est l’imagination qui met le remords aux trousses du péché. »

« Tu peux t’imaginer que tu es en sécurité et croire que tu es fort. Mais le hasard d’une nuance de couleur dans une pièce, un ciel matinal, un certain parfum que tu as aimé jadis et qui t’apporte de subtils souvenirs, un vers d’un poème oublié que tu retrouves, une mesure tirée d’une musique que tu avais cessé de jouer… crois moi, Dorian, c’est de ce genre de choses que nos vies dépendent. »

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Livre lu dans le cadre du Challenge des 100 livres !

6 / 71

Les 100 livres

Riikka Pulkkinen – L’Armoire des robes oubliées ****

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Éditeur : Le Livre de Poche – Date de parution : 2013 – 422 pages.

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Elsa, chercheuse de renommée en psychologie, est atteinte d’un cancer foudroyant. Elle décide de quitter l’hôpital et de passer les jours qui lui restent chez elle, en compagnie de ses proches. Ils lui rendent visite tous les jours, à tour de rôle. Ensemble, ils profitent de la vie, de chaque instant, du printemps. Une bouteille de vin, le soleil, la nature, l’air pur.

Il y a Martti, son mari depuis plus de cinquante ans, artiste peintre. Il y a leur fille Eleonoora. Leurs petites filles, Anna et Maria. Anna est la plus fragile des deux, la plus sensible. Avec son grand-père, elle aime prendre le tramway et réinventer la vie des gens qu’ils croisent. Un jour qu’elle passe une journée avec sa grand-mère, Anna découvre une robe dans une armoire, qu’elle n’a jamais vue. Cette robe va faire resurgir un passé enfoui depuis longtemps… Et une femme, Eeva.

Nous faisons un bond en arrière, et dans le prolongement des révélations de sa grand-mère, Anna se raconte l’histoire d’Eeva. En 1964, c’est le printemps, le mois de mai, elle a 22 ans, le même âge qu’Anna. Sa vie fait étrangement écho à celle d’Anna…

Le roman alterne entre présent et passé : nous plongeons dans les années 60, à l’aube des révoltes et du désir de changement. 1964, année de naissance d’un amour sublime et interdit« Aimer est la seule façon de rendre le monde vrai. » Le secret de famille déroule sa bobine au fil des mots ; j’ai aimé lire ces personnages, criants de vérité.

Je suis littéralement tombée sous le charme de ce roman fascinant, j’ai eu envie de noter tellement de phrases. C’est une lecture d’une douceur inouïe ; il s’en dégage une douce mélancolie, dénuée de tout pathos. Les mots sont justes, ils ont une force incroyable, chacun est à sa place.

Un coup de cœur, une vraie pépite finlandaise

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« Seuls ceux qui n’ont encore rien perdu peuvent faire une confiance si absolue. Seuls ceux qui n’ont pas été trompés. »

« Le monde était ici, avec toute sa bizarrerie et sa vacuité. Ce n’était pas une peinture, c’était le monde, nu, sans cesse à portée de sa main. »

« Tout a déjà commencé, tout avait déjà commencé lorsque j’ai sonné à la porte, tout avait commencé lorsque j’ai franchi le seuil. Tout avait commencé déjà bien avant. Tout est aussi vieux que le temps. »

Elle m’a demandé : « Comment peut-on aimer sans excès ? Et pourquoi, même, le faudrait-il ? Ca n’existe pas. »

Daphné du Maurier – Rebecca ***

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Éditeur : Le Livre de Poche – Date de parution : 2015 – 443 pages

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Je vous présente aujourd’hui ma toute première lecture dans le cadre du Challenge des 100 livres… Il s’agit de Rebecca, de Daphné du Maurier, qui m’attendait bien sagement dans ma PAL depuis quelques mois.

Présentation de l’éditeur : « J’ai rêvé l’autre nuit que je retournais à Manderley. » Ainsi débute le plus célèbre roman de Daphné du Maurier, qu’Alfred Hitchcock adapta en 1940 et qui n’a rien perdu de son charme vénéneux. dans une somptueuse propriété de la côté anglaise, hantée par le souvenir d’une première épouse disparue, une jeune mariée intimidée, un veuf taciturne, une gouvernante vêtue de noir s’observent dans un huis clos étouffant… Entre conte gothique et suspense psychologique, Rebecca entremêle les passions et les haines, les silences et les menaces avec, en bruit de fond, le ressac de la mer sur les galets de la crique…

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C’est à Monte-Carlo que la narratrice fait la rencontre du mystérieux Maxim de Winter. D’après les rumeurs, sa femme est morte noyée il y a quelques mois et il ne se remet pas de sa tragique disparition. C’est un homme secret, taciturne. Mais très vite, elle en tombe amoureuse et il la demande en mariage.

La jeune mariée se retrouve à Manderley, l’immense manoir situé sur la côte anglaise dans lequel vit Maxim avec une poignée de domestiques. La demeure, tout comme le personnel et le mari, semblent hantés par le souvenir de la première épouse, Rebecca. Elle semble partout. Ses appartements sont encore intacts, entretenus de façon un peu morbide par son ancienne femme de chambre, Mrs. Danvers. Lorsqu’elle les fait visiter à la jeune mariée, les paroles de la domestique m’ont glacé le sang… « On ne croirait pas qu’elle est partie depuis si longtemps, à voir tout cela, n’est-ce pas ? On croirait qu’elle vient de sortir et qu’elle va rentrer ce soir même. »

L’atmosphère de ce roman gothique devient vite angoissante. On sent le parfum des embruns, on entend le bruit de la mer et de son ressac. La tension grimpe doucement avec les non-dits, les conversations étouffées, l’aile ouest de la maison qui demeure plongée dans l’obscurité et inaccessible. Et Mrs. Danvers, toute vêtue de noir, se déplaçant sournoisement dans les couloirs…

L’écriture de ce thriller psychologique qui fait froid dans le dos est tout simplement sublime. Le suspense et l’attente nous saisissent à la gorge tout au long du roman. Sans dévoiler l’intrigue qui reflète une maîtrise parfaite de l’écriture et du suspense, je peux juste dire que je ne m’attendais absolument pas à un tel revirement.

Nous ne connaîtrons jamais le nom de l’héroïne qui parle à la première personne, ce qui participe de l’identification au personnage et nous invite à nous mettre à sa place. Nous nous projetons complètement dans l’histoire. La tension atteint son paroxysme dans les dernières pages. C’est après avoir lu les derniers mots, puis les avoir relus, et refermé le livre que j’ai accusé le coup. C’est limite si on ne pousse pas un soupir de soulagement en refermant ce livre.

Rebecca est un très grand roman que je ne suis pas prête d’oublier. J’ai encore le cœur crispé et je n’ai qu’une hâte : me plonger dès à présent dans le film d’Hitchcock.

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« Ici, me dis-je, nous avons vécu, nous avons été heureux. ceci était à nous, pour si peu de temps que ce fût. Nous avons beau ne passer que deux nuits seulement sous un toit, nous y laissons derrière nous quelque chose de nous-mêmes. »

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Petit rappel concernant ma progression dans le Challenge des 100 livres à avoir lus au moins une fois dans sa vie… j’avais à mon actif 29 livres lus, il m’en restait donc 71 à lire.

30 / 100

Les 100 livres

*Bon, The Crazy Books Company, je suis impatiente de lire vos billets !! June and Cie, Un Charmant petit monstre lit tout cru, Le Brocoli de Merlin, Petit Pingouin vert, Adlyn Loompa (non non, je ne mets absolument pas la pression :D)