Florence Cadier – Né coupable ***

Talents Hauts – 2020 – 160 pages

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Nous sommes en 1944 en Caroline du Sud. Pendant qu’en Europe, la fin du conflit mondial approche, dans cette région des États-Unis, la ségrégation bat son plein. George Stinney est un afro-américain de quatorze ans plutôt insouciant. Jusqu’à ce qu’il soit violemment arrêté par le shérif et accusé d’avoir tué deux fillettes blanches. Le garçon reconnaît les avoir croisées quelques heures avant leur disparition : aux yeux du shérif et de la population, il devient le coupable parfait

Né coupable est une lecture absolument glaçante ; une lecture qui s’inspire, hélas, d’une histoire vraie. George Stinney a vraiment existé et son procès demeure le plus expéditif et le plus scandaleux du XXe siècle.

La couverture révèle d’emblée l’issue fatale de l’histoire ; George est le mineur le plus jeune à avoir été soumis à la chaise électrique.

Dans ce court roman, Florence Cadier retrace les trois mois qui suivent l’arrestation du jeune garçon et sa condamnation. Jusqu’à son exécution. Les mots de l’autrice tentent de transmettre l’impuissance du garçon, et de sa famille qui cherche à prouver son innocence.

Un style simple qui rend compte de la violence de cette histoire – l’injustice, le racisme primitif. En toile de fond, la trame historique de la fin de la guerre. Né coupable est un livre qui m’a complètement bouleversée.

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Bren McClain – Mama Red ***

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Le Nouveau Pont – 8 octobre 2019 – 330 pages

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Avec son premier roman Mama Red, Bren McClain nous offre une plongée dans l’Amérique profonde des années 50 ; nous atterrissons dans une petite ferme de Caroline du Sud. On y rencontre des personnages en proie aux mêmes démons : le passé, la famille, l’éducation violente, la pauvreté…

Sarah se retrouve désemparée après la mort de Harold, son alcoolique de mari, et toute seule pour élever un enfant de six ans, qui n’est pas vraiment le sien… Emerson Bridge est en effet le fils que son mari a eu avec la voisine, Mattie, la meilleure amie de Sarah…

Bren McClain nous peint le portrait d’une mère qui peine à joindre les deux bouts – certains matins, Sarah n’a même pas de quoi préparer un petit déjeuner à Emerson. C’est aussi une femme qui demeure hantée par son passé et notamment l’éducation plutôt violente que sa mère lui a donné. Les derniers mots, empreints de haine, que cette dernière lui a adressés : « Tu ne feras jamais une bonne mère. » restent gravés dans son cœur. Jour après jour, Sarah compte ses dettes, coud des robes, et son passé la rattrape.

Quand elle apprend qu’un enfant a remporté près de 680 dollars à la foire au bétail grâce à un bœuf, Sarah en veut absolument un pour son fils… Il comblerait le vide laissé par son père et permettrait de gagner l’argent qui leur manque.

Ce veau, ils vont pouvoir l’acheter grâce à Ike Trasher, un propriétaire terrien à la générosité providentielle qui débarque un matin dans leur vie. Un curieux personnage, qui fait tout pour devenir un homme, un vrai, selon le vœu de son père.

Et Mama Red ? C’est une vieille vache à qui Sarah va beaucoup se confier. Une vache qui est avant tout une mère ; qui va briser sa clôture à s’en blesser le cou, parcourir plusieurs kilomètres en pleine nuit, afin de rejoindre son veau. Grâce à Mama Red, la jeune femme va enfin comprendre ce qu’est l’essence d’une mère.

Ce roman, c’est aussi le destin de LC Dobbins, inscrit au concours de bétail par son père, un éleveur de renom prêt à tout pour gagner et qui ne cesse de vouloir faire de son fils un homme, un vrai. Qui lui farci la tête avec les valeurs viriles et la chasse… LC est élevé à la dure, les claques sont quotidiennes et la douceur, la tendresse n’ont pas lieu d’être.

Le premier roman de Bren McClain est écrit avec simplicité et justesse ; il aurait pu verser dans le mélo ou la miévrerie, mais non. Il à réussi à me prendre aux tripes, véritablement. Un roman étonnant qui m’a tour à tour émue et révoltée. Mama Red ne nous épargne pas et nous délivre de belles réflexions sur la bienveillance, l’attachement maternel, la maternité – mais aussi la paternité, la violence faite aux êtres humains mais aussi aux animaux. Enfin, c’est surtout un roman sur la résilience.

Lecture dévorée dans le cadre du #PicaboRiverBookClub ❤