Éditeur : Folio – Date de parution : mars 2011 – 233 pages
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« Le 6 juillet 2004, Monsieur T. a poignardé sa femme de cinq coups de couteau. Il a ensuite quitté le domicile conjugal et s’est réfugié dans le jardin des voisins. C’est la qu’il a été découvert par la police. Quand, lors de son interrogatoire, on a demandé à Monsieur T. pourquoi il avait agi de la sorte, il a été incapable de répondre. »
C’est sur ces mots que débute l’étrange roman d’Olivia Rosenthal. On n’est pas là pour disparaître a pour sujet la maladie d’Alzheimer et ses effets sur le malade et sur ses proches.
La narratrice nous explique sans détour que ce livre lui tient vraiment à cœur, sans qu’elle sache vraiment pourquoi, tout en ayant peur que ça lui porte malheur… Mais elle ressent un besoin irrépressible d’écrire sur cette maladie. L’auteure nous livre également quelques pans de sa propre mémoire ; ses propres souvenirs s’insèrent au plus près de la mémoire défaillante du malade.
Le texte alterne entre plusieurs fragments, donnant l’impression curieuse d’entendre en même temps plusieurs voix différentes, qui se superposent. L’auteure nous délivre les extraits d’un interrogatoire sans queue ni tête de Monsieur T. par la police, des fragments de la vie d’Alois Alzheimer & les pensées confuses du malade.
A leur suite, s’ajoutent d’autres voix, à la façon de conseils donnés à un patient sur un ton presque clinique, et des tests nous sont proposés – « faites un exercice » – comme pour nous mettre dans la peau du malade… Le lecteur est par moment tutoyé, vouvoyé, il est convoqué pour prendre part à cette réflexion sur la maladie d’Alzheimer.
La voix de l’auteure semble parfois se confondre avec celle du malade, comme si elle cherchait à entrer dans sa tête.
C’est un livre à la fois dérangeant et magnétique qui aborde un sujet très complexe et sombre, à travers lequel l’auteure nous faire éprouver les sentiments de Monsieur T.
L’écriture d’Olivia Rosenthal est un électrochoc ; avec sensibilité, intelligence et de façon profondément poétique, elle pose des mots sur la perte de mémoire, la perte de raison, les souvenirs qui s’effacent, la maladie qui peu à peu s’empare de l’homme. Un roman qui n’en est pas vraiment un, qui prend aux tripes, qui secoue.
Un coup de cœur, un livre bouleversant qui va me poursuivre longtemps. Un livre hérisson, hérissé de marque-pages, comme autant de citations marquantes…
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« Il y a des moments où les choses, en perdant le nom qu’elles portent, s’éloignent. Si je ne fais pas des efforts acharnés pour les retenir, je finirai par les perdre toutes. Toutes les choses. »
« C’est bizarre d’éprouver le manque de quelque chose qu’on ne connaît pas. D’habitude, quand quelque chose vous manque, on sait ce que c’est, c’est d’ailleurs pour ça qu’il ou elle manque. Le manque, c’est quand on me retire une chose dont je sais qu’elle m’est nécessaire et dont l’empreinte reste en moi vivace. Mais là, c’est autre chose, un manque flottant, un manque profond que je ne peux pas circonscrire. C’est pire, bien pire, parce que j’ai beau réfléchir, je ne sais pas ce qui manque. »
Un excellent souvenir de lecture. Ravie, ravie que tu l’aies également aimé. Belle chronique, merci !
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Oh, merci! 🙂 J’aime de plus en plus cette auteure! J’ai emprunté à la bibli « Mécanismes de survie en milieu hostile », tu l’as lu ?
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Non, je ne l’ai pas lu. Mais peut-être que cela ne va pas tarder…j’ attends ta chronique !
A très bientôt 🙂
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🙂 à très bientôt!
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Le thème est dur… Intrigant comme livre, mais pas dans mes envies du moment.^^
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Haha, à chaque moment ses envies de livres! C’est clair qu’il faut trouver le bon moment pour lire ce bouquin, qui abord en effet un sujet très dur…
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J’aime beaucoup l’originalitéde cette auteure et je n’ai pas lu celui-ci. Je le note
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Oui moi aussi j’aime beaucoup sa plume, qui sort de l’ordinaire 🙂 j’accroche à chaque fois! Il me tarde de lire ses autres romans. Tu as lu lesquels ?
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J’ai lu Que font les rennes après Noël? Et Mécanismes de survie en milieu hostile. Tous deux originaux. Le second, peut-être un peu plus difficile à appréhender.
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J’ai lu aussi le premier et malgré l’écriture que j’avais trouvé très étrange à l’époque, j’avais bien aimé. Et j’ai le second dans ma PAl, un emprunt de bibli 🙂 je te dirai ce que j’en pense!
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Je ne connais pas l’auteur, mais pourquoi pas, ton avis me donne envie de découvrir ce roman alors je note le titre ! 🙂
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Je te le conseille vraiment 🙂 c’est un bon moyen de découvrir cette auteure, que j’apprécie de plus en plus… Elle a vraiment une plume singulière!
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Ce titre est furieusement beau. Et la plume m’a l’air tout aussi séduisante.
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Oui c’est vrai que le titre est très beau… Et je pense que la plume te plairait ! IL faut absolument que tu découvres cette auteure 😉
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Je note dans ce cas !
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Après avoir lu une telle chronique, je ne peux que vouloir découvrir à mon tour cet ouvrage !
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🙂 il m’a vraiment marqué ce bouquin !! Il y a une telle force dans l’écriture d’Olivia Rosenthal…
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C’est un sujet dur, en effet! Tu en parles drôlement bien 🙂 La narration a l’air compliquée, non?
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Merci 🙂 un sujet bien difficile, oui… mais traité avec tellement de talent et d’intelligence! C’est vrai que la narration peut paraître un peu complexe de prime abord, mais il faut aller au delà, c’est un roman incroyable.
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